Mani s’isole

  • Anouar Brahem – Raf Raf
  • Depuis quelque temps Mani s’est retrouvé un peu seul, beaucoup d’événements se sont succédé, les temps sont durs et lui au lieu de s’endurcir avec eux ca n’a fait que le fragiliser à chaque fois encore plus, il décida d’aller prendre quelques jours dans une résidence secondaire, Une petite maison de campagne, entre montagne et mer.

    Son courage pris à deux mains, il prépare son sac et prend la route, arrivé a bon port, il redécouvre ces murs, ce jardin, ces paysages, ces odeurs…

    Il ouvre cette porte bleue et rentre dans le noir, il a l’impression de se reperdre, une ambiance lourde, une forte odeur d’humidité lui perce les narines, une envie de faire quelques pas en arrière lui vint à l’esprit, un envie de fuir, de courir, redescendre ces marches et remonter dans la voiture et repartir loin, une envie de lumière, d’air et de liberté se frée un petit chemin parmi toutes ces pensées morbides, il ouvre les fenêtres, les rayons du soleil transpercent le noir de cette maison, au fur et à mesure qu’il ouvre les fenêtres, un air frais remplace cette lourdeur humide qui commençait à l’étouffer, Il prends son bouquin et se met sur la terrasse face a la mer, un silence paisible parfois interrompu par un chant d’oiseau , une braiement d’âne ou le bruit d’un vélomoteur, il consomme les pages de son bouquin l’une après l’autre, brule ses cigarettes dans un rythme effréné.

     

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    Envie de marcher, envie de se fatiguer, envie de redécouvrir cette montagne qui, il fut un temps, un de ses refuges préférés.

    Passer à travers ces chemins battus, ces sentiers étroits et ornées d’arbustes, lui rappela de nombreux souvenirs, des souvenirs d’enfance, des rires, des journées entières passées a se balader dans cet énorme trésor de beauté, il entame la montée, l’odeur du thym et du romarin l’envoutait encore et encore, plus il avançait plus il se sentait libre, frais, rajeuni, il atteint une grotte, une création divine, adaptée par des mains humaines, on y trouve comme des chambres, un coin pour les feu, il y a même une table et des chaises, il se pose pendant quelques minutes, un moment d’observation, la ville a changé, les gens ont changé, mais cette beauté reste la même, à partir de cette petite grotte on a une vue sublime, une vue en hauteur de tout une plaine verdoyante, une plage au sable fin et un ile invulnérable à ces vagues qui se cassent sur ses rochers , après une cigarette, un peu e repos, il reprend son chemin pour le sommet , les sommets d’un mont qui incarnait le défi pour un gosse, le refuge pour un adolescent et qui incarne la thérapie pour un Mani à la recherche d’un soi qui s’effrite.

     

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    Les sentiers sont de plus en plus étroits et rocheux et les prises se font de plus en plus rares et difficiles à prendre, une fois il glisse, une autre il trébuche, il s’accroche a un buisson, il tire sur un arbuste pour s’aider à monter, plus il avance plus la vue s’élargit, plus il se sent libre, loin de toute contrainte, loin de tout et de tous.

    Arrivé au sommet, Mani se laisse prendre par la vue, l’espace, la brise qui caresse son visage suant, essoufflé, il se pose sur un tronc d’arbre et laisse ta vue se perdre dans l’infinité de l’horizon, figé, sans aucun mouvement, la tète vide et légère, un sentiment d’apaisement le prend, une joie, un plaisir, une jouissance, il ferme les yeux pour immortaliser ce moment.

     

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    D’un coup, ses pensées traversent l’immensité de cette méditerranée, les rejoindra-t-il de corps ?

    Le temps passe vite, les rayons du soleil commencent a perdre leur éclat, ils se cachent tantôt derrière une brume tantôt derrière un arbre ou un rocher, l’horizon rougit, un vent glacial balaye le haut de cette montagne, des éclats de tonnerre se font entendre et des éclairs apparaissent au loin, le temps se gâte, il se hâte pour engager la descente, des gouttes commencent a tomber sur son visage, il accélère la course, l’orage approche, plus il hâte le pas, plus les gouttes se multiplient, une poussière dense s’élève sous l’impact de ses pas, l’odeur ensorcelante d’une terre à soif d’eau remonte, une terre à soif de vie, il fait de plus en plus sombre, il n’arrive plus a se créer un passage entre ces pierres et ces feuilles que le vent fait danser devant lui, un sifflement assourdissant transperce ses tympans, le grondement du tonnerre s’alourdit, les flashs des éclairs l’aveuglent et l’empêchent de tracer son chemin.

    Perdu dans les ténèbres, Mani se remémore les raisons qui ont fait qu’il se retrouve perdu dans la nature, impuissant, incapable d’avancer, le froid lui coupe les membres, les sentiers de la montagne se transforment en petits ruisseaux qui le font glisser, pris dans la trappe des flots de boue.

    Une impuissance accablante s’abat sur lui, il essaye de fermer les yeux, essayant de fuir cette réalité qui le rattrape, il essaye de crier, il n’y arrive pas, il manque d’air, il commence a suer, malgré le froid et la pluie, une chaleur insupportable envahit son corps…

    Il ouvre les yeux, son corps est là à trembler comme une canne en plein mistral, il essaye de déchiffrer les bruits assourdissant qui lui remplissent la tête, des coups de marteau et les grésillements de perceuse, le voila sur son lit, il souffle, incapable de bouger, retour a la vie, retour à la réalité, sa réalité, encloitré entre quatre murs.

    Les travaux de l’appartement d’en haut ne semblent pas se terminer de si tôt.

     

    PS : A mon cher ami et frère Rfig, qui consulte mon blog, La chanson RafRaf de Anouar Brahem est plus appropriée à cette note.

    Au plaisir de te revoir mon frère.

     

    13 réflexions au sujet de « Mani s’isole »

    1. magnifiquement écrit, profond, troublant, déchirant…mes larmes coulent en même temps que les gouttes de pluie s’abattent sur ton visage et mon coeur bat au rythme de ta course à travers l’orage…

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